Jamais, non, jamais un restaurant ne m’a laissé un tel sourire fixé sur le visage, surtout quelques jours après.
Il faut absolument que je partage cette expérience avec vous.
Une amie parisienne et moi-même nous sommes données rendez-vous un soir dans le quartier de Montparnasse à Paris, riche en théâtres et petits restaurants de charme. Arrivées devant celui que l’on nous avait fortement recommandé, nous n’avons pû que constater sa fermeture.
Après une très courte balade dans le quartier (il faisait froid !), nous avons jeté notre dévolu sur le B. de l’E. Mon regard avait été épinglé par la carte des desserts. La mention de riz au lait caramélisé aux fruits frais m’avait ferrée. Sus au B. de l’E. ! (non, je ne veux pas de procès pour diffamation bien que tout ce que je raconte soit véridique).
Le cadre y est moderne, la décoration également. Les tables sont disposées à la parisienne, ce qui signifie que les occupants de la table voisine -que vous ne connaissez pas mais dont vous allez pouvoir suivre la conversation même s’ils chuchotent- devront se contorsionner et passer leurs fesses tout près de votre assiette quand ils chercheront à s’extirper de leur place. Mais à Paris, cette configuration n’a rien d‘exceptionnel. Les serveuses sont aimables, souriantes et efficaces.
J’ai choisi des noix de St jacques rôties avec purée de butternut en plat principal. Un peu d’attente remplie par nos bavardages. Et le plat est arrivé : 3 petites noix de St Jacques -sans corail bien sûr- servies dans une sauce excellente. A côté de l’assiette creuse, un minuscule ramequin, de ceux utilisés dans les hôtels pour y mettre la dose de beurre par personne pour le petit déjeuner. A ma question sur le ramequin, la serveuse m’a répondu, comme s’il s’agissait d’une évidence : « C’est votre purée de butternut ! »
C’était très bon, je le répète. Digne d’une excellente entrée. Pas d’un plat principal.
Je suis une petite mangeuse. Il m’arrive assez régulièrement de renoncer à prendre un dessert par manque de place dans mon estomac. Donc, rien de grave. Je me suis dit que j’allais pouvoir pleinement apprécier mon dessert. J’avais en référence l’excellent riz au lait servi dans le restaurant « La Régalade Conservatoire », servi dans un bocal de taille respectable. Un riz au lait évoque dans mon esprit quelque chose de traditionnel, de familial, de copieux.
Imaginez, juste un instant, ma tête quand j’ai vu arriver… une buchette de la taille d’une grosse allumette (pour être sympa) avec deux gouttes de caramel dans un coin de l’assiette. Le summum : les fruits frais annoncés sur la carte. Ils se sont résumés à quelques micros dés de pomme posés sur la buchette. Et le gout ? si je vous dis que son gout a encore moins comblé mes attentes que sa vue ?
Mais il a provoqué un fou-rire entre mon amie et moi. Elle non plus ne s’y attendait pas. 5 euros pour un échantillon de riz au lait, on ne me l’avait jamais faite encore !
J’ai pensé à certains gros mangeurs de mon entourage et j’ai adoré imaginer leur stupéfaction et leur déception devant la grosseur des plats proposés.
Et j’ai donc fini le restaurant en ayant faim, pour la première fois de ma vie. Je le répète, je suis une petite mangeuse. Au restaurant La Régalade Conservatoire, il m’est arrivé de me contenter d’une entrée pour pouvoir gouter au dessert. Là… je n’ose même pas imaginer la taille de leurs entrées.
Je suis rentrée chez moi la faim au ventre et le sourire aux lèvres. Un bout de pain avec du miel a comblé mon gouffre stomacal.
Et depuis, en repensant à cette soirée, je souris.
Le très gros avantage de ce restaurant : on ne grossit pas. Seul le portefeuille mincit et il n’y a pas de gaspillage de nourriture.
Alors, on y retourne ?